Signé afin de limiter les effets de la crise, l’accord de transformation d’activité (ATA) doit permettre de préserver 10 000 emplois au sein du groupe aéronautique. Explications avec Eric Durand, coordinateur CFE-CGC.
L’aéronautique n’échappe aux affres de la crise économique liée à la pandémie de Covid-19. Poids lourd du secteur, Safran (45 000 salariés en France, 100 000 dans le monde) prévoit ainsi une chute de 35 % de son chiffre d’affaires en 2020, conséquence notamment de l’effondrement du trafic aérien mondial et des baisses de cadences de production.
C’est dans ce contexte que Safran a initié, avec les syndicats, une négociation en vue d’un accord de transformation d’activité (ATA). Paraphé le 3 juillet par la CFE-CGC (première organisation syndicale), la CFDT, FO et la CGT au terme d’un mois d’intenses discussions, l’accord, valable jusqu’à fin 2021, « doit permettre de traverser les 18 premiers mois de la crise, de maintenir la compétitivité et de préserver l’emploi et les compétences », résume Eric Durand, coordinateur CFE-CGC, lui-même salarié sur le site d’Issoudun (Indre). « En tant que syndicat majoritaire, nous avions un leitmotiv : préserver les emplois et les savoir-faire pour être prêts quand la reprise sera là. Cet accord démontre qu’une alternative aux licenciements massifs est possible quand la direction et les partenaires sociaux partagent la volonté de le faire. Malmenés depuis plusieurs années, les syndicats montrent dans cette négociation tout l’intérêt d’un dialogue social ouvert et constructif. Peut-être le début d’un syndicalisme 4.0 tourné vers le futur. »
« UN ACCORD CONSTRUCTIF DONT NOUS POUVONS ÊTRE FIERS »
Dans le détail, l’accord de transformation d’activité engage la direction, jusqu’à fin 2021 et moyennant quelques contreparties (recours à l’activité partielle, restrictions sur l’intéressement et la participation) à ne procéder à aucun licenciement économique dans le cadre de plans de sauvegarde de l’emploi (PSE). « De quoi préserver 10 000 emplois et les compétences associés, estime Eric Durand, un des quatre négociateurs CFE-CGC (avec Didier Jouanchicot, Patrick Potacsek et Daniel Verdy). Nous avons préféré perdre 7 à 10 % sur nos salaires plutôt que d’encourir un PSE et risquer des licenciements secs. Au final, c’est un accord constructif dont nous pouvons être fiers. »
L’accord prévoit par ailleurs des mesures incitatives (majoration de l’indemnité de départ, rachat de trimestres) pour encourager le départ en retraite volontaire et met en place des mesures d’accompagnement des salariés : mobilité interne et externe, formation et développement des compétences. Autre point positif : le plan d’embauche de 300 jeunes diplômés et de 450 apprentis en 2021.
PLACE DÉSORMAIS A LA NÉGOCIATION SUR L’ACTIVITÉ PARTIELLE DE LONGUE DURÉE (APLD)
En complément de cet accord, la direction et les syndicats ont débuté une copieuse négociation sur l’activité partielle de longue durée (APLD), le nouveau dispositif qui offre la possibilité à une entreprise – confrontée à une réduction durable de son activité – de diminuer l’horaire de travail de ses salariés et de recevoir, pour les heures non travaillées, une allocation en contrepartie d’engagements, notamment en matière de maintien en emploi. Plus largement, « il faut anticiper la reprise et créer les conditions favorables pour former les salariés, s’adapter aux métiers de demain, miser sur la R&D et réfléchir aux nouvelles organisations du travail, dont le télétravail », conclut Eric Durand.
Mathieu Bahuet