Le gouvernement vient de relancer la réforme de l’assurance-chômage. Jean-François Foucard, secrétaire national CFE-CGC à l’Emploi et à la Formation, y voit d’abord une opération de communication politique.
Avec François Hommeril, président confédéral, vous avez rencontré, lundi 25 janvier lors d’une réunion bilatérale, la ministre du Travail, Elisabeth Borne. Qu’en est-il ressorti ?
La ministre s’est montrée relativement ouverte, et cela faisait longtemps que nous n’avions pas eu une discussion aussi franche. Cela dit, si elle a réécouté nos arguments, elle n’a pas dit ce qu’elle ferait de cette réforme sur le fond. Mon analyse est que le gouvernement veut la mener à bien pour des raisons politiques, pour pouvoir dire à son électorat qu’il l’a faite (avec la campagne présidentielle en ligne de mire), tout en sachant très bien que son application sera impossible au 1er avril 2021 du fait du contexte économique.
Des dates et des critères d’application ont-ils été précisés ?
Non, mais l’idée générale, si nous avons bien compris, est que cette réforme pourrait s’appliquer à une date indéfinie quand les conditions économiques le permettraient… Et que pour prendre une telle décision, il faudrait mettre en place des indicateurs économiques dont nous n’avons aucune idée pour l’instant. De toute façon, quels que soient les critères d’application, nous contestons le bien-fondé de cette réforme, d’autant plus dans les conditions du marché de l’emploi pour les années qui viennent. La seule chose que demande la CFE-CGC concernant la réforme de l’assurance-chômage, c’est son retrait pur et simple.
Sur le contenu technique de la réforme, avez-vous constaté des assouplissements ?
Il semble que la ministre veuille faire un geste en direction des jeunes en raccourcissant – peut-être de six mois à quatre mois – la durée de travail nécessaire pour qu’ils puissent toucher des allocations chômage. Elle aurait également une solution sur le salaire de référence pour tenir compte des contraintes qu’a fixées le Conseil d’État (1). Nous avons, de notre côté, réitéré notre opposition frontale à la dégressivité des indemnités pour les cadres, une mesure discriminatoire pour rien et absurde quand on connaît le marché du travail des cadres et des cadres supérieurs en particulier. Nous devrions avoir une concertation multilatérale d’ici deux ou trois semaines qui permettrait au gouvernement de boucler sa transaction, si je puis dire, et d’afficher politiquement sa réforme. Dans un souci de marketing politique.
(1) Le Conseil d’Etat a annulé en novembre 2020 l’une des dispositions de la réforme gouvernementale de l’assurance chômage portant sur le nouveau mode de calcul du salaire de référence, en jugeant qu’il introduisait « une différence de traitement manifestement disproportionnée » entre les demandeurs d’emploi et donc qu’il portait « atteinte au principe d’égalité ».
Propos recueillis par Gilles Lockhart